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Immersion, entre Katmandou et Pokhara

par | 23 décembre 2010 | 6 commentaires

De Katmandou nous n'aurons quasiment rien vu, mais ça n'était pas le but. Qu'elle soit occidentale, orientale, du nord, ou du sud, la "ville" ne pourra jamais nous faire vibrer autant que les grands espaces naturels que nous sommes venus chercher, si loin.

De Katmandou nous n’aurons quasiment rien vu, mais ça n’était pas le but. Qu’elle soit occidentale, orientale, du nord, ou du sud, la « ville » ne pourra jamais nous faire vibrer autant que les grands espaces naturels que nous sommes venus chercher, si loin. En attendant, il faut reprendre notre cheminement, par la route cette fois-ci, et rejoindre la vallée subtropicale de Pokhara, environ 200 km à l’ouest de Katmandou, porte d’entrée du trekking  himalayen.

Pokhara était une petite ville provinciale et un centre de commerce, jusqu’à ce que l’avènement du trekking au Népal ne la transforme en grosse destination touristique.

Établie au coeur d’une large vallée subtropicale, la Seti Gandaki, située dans la partie centrale du pays à environ 200 km à l’ouest de Katmandou, elle est entourée de collines pré-himalayennes.

C’est aussi un spot internationalement prisé par les parapentistes, avec des conditions aérologiques d’exception, ajoutées au « filet » de sécurité offert par les lacs à l’eau tempérée qui l’entourent.

Il n’y a pas d’autres endroits au Népal où les montagnes s’élèvent aussi vite. Dans cette zone, sur moins de 30 km, l’altitude passe rapidement de 1000 m à plus de 7500 m. Le Dhaulagiri, la chaîne des Annapurna et du Manaslu, qui culminent chacun à plus de 8000 m d’altitude, y sont largement visibles. Les montagnes dominent tout l’horizon nord de la ville et sont une source constante de contemplation.

Autoroute Népalaise

Bien qu’une ligne régulière permette de rejoindre Pokhara en avion, en moins d’une demi-heure, et à un prix très accessible, Tangi préfère nous faire partager l’expérience du déplacement routier afin de vivre complètement l’immersion en terre Népalaise, en plus d’une grosse surprise à mi-parcours.

Dans ce cas, ce sont plutôt 4 à 6 heures nécessaires pour boucler ces 200 « petits » kilomètres, charme des routes Népalaises oblige !

Afin d’optimiser l’espace plutôt réduit du Nissan, pour 5 personnes en plus du chauffeur, les sacs voyagent sur le toit, tandis que nous démontons à nouveau les vélos pour les faire entrer dans leurs sacs respectifs. Le confort est spartiate, mais on est « roots » ou on ne l’est pas !

On s’extirpe très lentement de Katmandou, avec à nouveau la claque du spectacle de tous les instants. La poussière, la saleté, les immondices, les logements ou les équipements inachevés ou rafistolés sont omniprésents.

Au milieu de ce délabrement généralisé et cette misère apparente, des diamants bruts ressortent sous forme de fleurs, de visages souriants, d’enfants en uniforme d’écoliers, de femmes en sari multicolores, et de neiges éternelles.

Une chicane en blocs de pierre grossièrement peints, une barrière en bambou, un groupes de préposés derrière une table en bois hors d’âge posée à même la terre, un échange de petites coupures sans un mot : nous venons de passer le péage pour l’autoroute. « Chouette, ça va nous remonter la moyenne ! » Mais dès les premiers virages d’une route à deux voies légèrement plus large qu’à l’habitude, on réalise qu’il n’en sera rien, et que seul notre rythme cardiaque va s’accélérer.

Utoroute vers Pokhara

Le trafic est dense, et nous suivons toutes les circonvolutions d’une vallée encaissée, où chacun tente de doubler à la moindre occasion.

Parfois, le camion d’en face fait un écart sur notre voie pour éviter une portion sans bitume, qui se creuse à vue d’oeil. Puis c’est notre chauffeur qui tente de doubler en côte ou en plein virage dans un nuage de poussière. Ca se frôle de partout, ça klaxonne sans interruption, ça tabasse sur les nids de poule, pendant que les cantonniers hyper exposés rafistolent en continu et à mains nues les remblais qui s’effondrent.

Il y a des villages partout. La route les traverse en donnant parfois l’impression de pénétrer les petites maisons et commerces faits de tout et de rien, tant ceux-ci sont proches et ouverts sur la voie. Et on imagine facilement ce que leurs occupants doivent respirer tous les jours.

Peuple de marcheurs et de porteurs, il y a des hommes, des femmes et des enfants dans les lieux les plus improbables, avec une charge à l’encombrement et au poids toujours au-delà de ce que l’on croit possible, portée sur le dos et tenue par une unique sangle passée sur le front.

Technologie Autrichienne au service des pèlerins

Après avoir échappé à toutes sortes d’incidents (merci à notre Karma, et plus prosaïquement  à notre chauffeur qui assure bien), nous arrivons à la mi-parcours à Kurintar en fin de matinée, au bord de la rivière Trisuli.

Le timing de Tangi est une fois encore assez précis compte tenu de tous les aléas évoqués. L’objectif est de remonter les vélos en quatrième vitesse pour se présenter avant la fermeture du télécabine pour le déjeuner. Astérism et moi-même devenons très entrainés à ce petit jeu de la clé allen.

Un télécabine ? Oui, un vrai, le seul du pays ! Comme souvent au Népal, il est à l’origine d’une initiative occidentale (autrichienne) qui a permis cet investissement à travers un partenariat avec les autorités. De tout notre séjour, c’est sans aucun doute l’équipement le plus moderne et entretenu que nous aurons vu.

Le lieu choisi n’est pas anodin, car il permet de relier directement, en 10 minutes et après 1200m de dénivelé positif, le temple de Manakamana, haut lieu de dévotion à la fois bouddhiste et hindouiste, dont la déesse éponyme exauce parait-il tous les voeux (on y sacrifie au passage toutes sortes d’animaux en série pour satisfaire d’anciennes croyances toujours pas révolues). Avant cela, il fallait une bonne demi-journée de marche aux pèlerins sportifs pour pouvoir accéder au temple.

Curiosité unique dans le pays, un vrai télécabine moderne (Autrichien) qui donne accès au temple de Manakamana, haut lieu religieux à la fois Hindouiste et Bouddhiste

 

Les descentes de Manakamana

Après un déjeuner succulent et parfaitement en accord avec la tradition, un dal bhat, plat traditionnel Népalais à base de riz et de soupe de lentilles, dans un cadre idyllique à proximité du temple, nous terminons la montée vers celui-ci par quelques escaliers au milieu d’une foule de plus en plus dense.

La place du temple nous laisse sans voix. Entre la bâtisse antique et austère envahie par les pigeons, le brouhaha des pèlerins, des cloches, des marchands (du temple) ou des simples touristes, des prières, avec l’odeur du sang et la fumée des sacrifices en cours, les pelotes de fils électriques qui traversent le lieu de part en part, les enfants et curieux qui nous observent nous équiper pour la descente à venir, on ne réalise plus trop où l’on est, comme si nous débarquions d’une autre planète.

DSC00121

J’en oublie d’ailleurs de déclencher ma caméra de casque, alors que nous empruntons une ruelle étroite bondée d’étalages et de vie locale. On ne le savait pas encore, mais la ruelle en question est une succession sans fin de marches et de petits escaliers plus ou moins raides, dans lesquels nous faisons le spectacle, du moins pour les enfants.

A notre deuxième passage, j’aurai une seconde chance de filmer l’intégralité de cette descente, au moment de la sortie de l’école, avec des gamins qui sautent et courent dans tous les sens ! La première descente emprunte logiquement l’un des  sentiers originaux de la montée au temple, avec un panorama parfois vertigineux. Certains passages sont plutôt engagés avec moult escaliers ou marches d’un gros gabarit, tandis que la deuxième partie est un enchainement sans fin d’épingles tracées au cordeau, avant une traversée de village et d’un pont himalayen qui franchit la rivière Trisuli.

On remet ça à nouveau dans l’après-midi, mais avec cette fois-ci une bascule sur l’autre versant de la montagne, qui nous fait découvrir un enchainement de sentiers en terre rouge compacte (inroulable pendant la mousson) très long et ludique.

Arrivés à la nuit tombante sur une petite route, lieu de rendez-vous avec notre chauffeur qui est… absent. Tangi ne se démonte jamais et parvient finalement à le contacter pour lui ré-expliquer où il doit se rendre (comme la plupart des asiatiques, les Népalais disent souvent « oui, oui » sans forcément avoir tout compris 🙂 ). En attendant, les habitants du coin qui font bar-épicerie nous servent les fameuses Tuborg 66cl désormais incontournables, et toutes sortes de chips pour un apéro royal, au milieu des poules, et des enfants de retour de l’école qui font leurs devoirs dehors à la lueur faiblarde des néons.

Arrivée tardive à notre hôtel à Pokhara, mais juste à temps pour une douche chaude et un excellent resto Indien recommandé par Tangi, dans le quartier animé de Lakeside.

Downhills in Pokhara

Matin gris sur Phewa Tal, le lac qui borde le sud de la ville. Les fameuses chaines de montagnes qui devraient nous sauter aux yeux jouent encore les timides, avant de se dévoiler progressivement tout au long de la journée.

Nous entamons dans notre vieux Nissan, l’une des cinq navettes de la journée, axée clairement : descente et freeride ! Une journée « à l’Italienne » donc, mais sur un terrain bien éloigné des châtaigneraies Liguriennes. Je passe sur les montées avec le van, sur des routes ou pistes plus ou moins étroites et carrossables, vous voyez d’ici le topo 😉

Nous allons parcourir dans la journée deux secteurs sur deux collines différentes, avec le privilège de pouvoir repasser deux fois dans nos traces, pour un plus grand plaisir et un pilotage libéré. Durant ces sept dernières années, Tangi a exploré et exploité les moindres sentes des environs pour nous en proposer la crème. Inutile de préciser que les nombreux treks VTT qui fleurissent au Népal n’y poseront sans doute jamais leurs roues !

Flo jump sur Pokhara

Grandes descentes certes, mais pas sans quelques coups de cul (appelés simplement « culs » par Tangi 🙂 ), et portions de pédalage, notamment à l’arrivée sur la plaine de Pokhara. De la pente herbeuse, des sauts, des enchainements ravinés, de la piste mach 2, du balcon, des… escaliers (!), du sous-bois presque comme dans la Valmasque… mais avec les singes en plus, des temples, des restanques, des rizières, des buffles, des vaches, des chèvres, des poules, et des finals dans les ruelles/sentiers de la banlieue pauvre de la ville.

Pour le reste, il faudra attendre la vidéo embarquée qui sera tellement plus parlante qu’un long discours 😉

Prochain épisode : comment nous entrons finalement en Montagne par la grande porte…